Le candidat de la plateforme Lamuka, Martin Fayulu, a bouleversé toutes les prévisions dans la course à la présidence.

Le « petit » candidat supporté par le duo Katumbi-Bemba suscite un engouement général. La Kabilie tente de l’abattre par tous les moyens. Son nom devrait apparaître prochainement, si ce n’est déjà fait, sur le bureau du Procureur général de la République. Des convocations devraient être lancées très prochainement. Il faut coûte que coûte éliminer le soldat Fayulu.
La date du 11 novembre va marquer durablement l’histoire de la République démocratique du Congo. Ce jour-là, à Genève, sous l’égide de la Fondation Kofi Annan, les sept « leaders de l’opposition » congolaise sont réunis sous le même toit.

Objectif : désigner un candidat commun de l’opposition pour affronter le dauphin du président hors mandat Joseph Kabila qui bénéficie de toutes les largesses du régime en place.

Des sept « leaders », trois sont empêchés de concourir pour divers motifs : Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba et Adolphe Muzito. Seuls restent en lice Félix Tshisekedi, Vital Kamerhe, Freddy Matungulu et Martin Fayulu. Les deux premiers cités sont les grands favoris. « Mais ils ne font pas peur au pouvoir en place qui les connaît très bien », explique un candidat aux législatives du FCC, la plateforme de la Kabilie.

s’entendre entre eux », nous avait expliqué Moïse Katumbi quelques jours avant ce rendez-vous. Mais cette trame idéale n’aboutit pas. Alan Doss, le directeur exécutif de la Fondation Kofi Annan, sort alors un autre scénario de sa manche. Un scrutin à deux tours. Les quatre candidats qualifiés désignent les deux finalistes entre eux. Les trois « empêchés » les rejoindront pour le second tour. Chacun des quatre candidats dispose, au premeir tour, de deux voix qu’ils doivent attribuer à deux candidats. Chacun se réserve une de ses voix. Pour la seconde, Kamerhe et Tshisekedi cherchent à s’éjecter mutuellement. Ils votent donc chacun pour un des « petits » candidats. Matungulu et Fayulu évitent aussi de voter pour un des deux « grands ». Bilan : Kamerhe et Tshisekedi sont privés de second tour. La finale se jouera entre les deux « petits » candidats issus tous les deux du Bandundu.
« La surprise était de taille » , reconnaît Bemba. Fayulu l’emporte finalement d’une courte tête face à Matungulu. Les six candidats se plient au verdict et l’annoncent publiquement devant les caméras des médias internationaux. Tous jurent leur grand dieu qu’ils se battront pour imposer le nom de Fayulu à leurs états-majors et à leurs bases respectives.

Moins de 24 heures pour un reniement

Le 12 novembre, l’enthousiasme de l’opposition congolaise est douché. Félix Tshisekedi, malgré ses déclarations matamoresques à Genève, annonce en lisant un texte sur les ondes de Top Congo, qu’il reprend sa signature. Moins d’une heure plus tard, sur la même radio, Vital Kamerhe reprend à son tour son engagemnt dans des termes et avec une argumentation très semblables.

La belle unité de l’opposition vacille. Le pouvoir de Kabila se délecte. Le boulevard pour l’élection de son candidat Ramazani Shadary est tout tracé. Piqués au vif par cette « trahison », les cinq autres leaders présents à Genève parviennent à serrer les rangs et annoncent solennellement qu’ils respecteront leur promesse faite au peuple congolais. Ils font front derrière le candidat Fayulu et créent la plateforme politique Lamuka pour porter cette candidature.
Quelques jours plus tard, Kamerhe et Tshisekedi sont contraints de partir ensemble pour espérer jouer encore jouer un rôle dans cette campagne. Ils créent le mouvement Cap pour le changement (Cach).

Katumbi promet « une campagne a l’américaine ». La Kabilie se gausse. Son candidat est déjà en campagne… bien avant la date légale pour le début de cette campagne. Le ton est donné. Le candidat présente son équipe. plus de 700 membres, la plupart issus du gouvernement ou d’autres institutions de l’Etat. Encore une fois, le pouvoir se moque des lois. Mais ce détournement des moyens de l’Etat au profit d’un candidat est vraiment indigeste. Ramazani doit revoir sa copie. Premier petit revers sans conséquence de prime abord. Mais les Congolais, déjà las du pouvoir kabiliste, enregistre cet énième détournement de fonds et de moyens au service d’une clique peu désireuse de partager son pouvoir.

Un choix unificateur

Martin Fayulu est de retour à Kinshasa, non sans mal. Le jet qui devait le ramener à Kinshasa ne reçoit pas l’autorisaton d’atterrir. Qu’à cela tienne, Fayulu prendra un avion de ligne et bénéficera d’un accueil qui démontre que le candidat n’est pas si « petit » que certains voulaient le dire. A kinshasa, il doit structurer son mouvement. Personne n’avait réellement envisagé sa candidature. « Il a fallu apprendre à se connaître » , explique un cadre d’Ensemble. La campagne tarde à démarrer. Le pouvoir est serein. Certains se moquent de Fayulu. « Peut-être compte-t-il faire toute sa campagne sans sortir de chez lui? « , entend-on. Cet immobilisme et la naissance du mouvement Cach vont pousser certains cadres, originaires du Kasaï, à quitter les rangs de Lamuka. Le pouvoir kabiliste boit du petit lait. Le patron de la Ceni joue sur du velours. Les jeux semblent faits. Avec les machines à voter, un fichier électoral largement corrompu et une non campagne des adversaires, même pas besoin de surjouer.

Tout commence à se compliquer pour le pouvoir le 4 décembre. Ce jour là, il découvre que Martin Fayulu dispose de vrais moyens pour sa campagne. Quatre avions ont été loués en Afrique du Sud pour sa campagne. La Kabilie esquisse un premier rictus et bloque de manière tout à fait illégal les appareils. Finalement un seul avion sera autorisé à atterrir. Le 5 décembre, Fayulu doit commencer sa campagne. Rebelote, Kinshasa tente d’entraver son départ. Trois heures perdues avant de décoller. Arrivé à Goma, où il doit prendre un petit porteur pour se rendre à Beni pour son premier meeting, les difficultés s’enchaînent. Les pilotes/propriétaires des petites compagnies locales ont reçu des menaces. Finalement, Fayulu et sa petite équipe parviennent à trouver un avion et arrivent à Beni alors que le jour est en train de tomber. Fayulu; l’homme du Bandundu, de l’ouest de la RDC, est accueilli par une foule immense dans cette ville du Nord-Kivu qui a payé un lourd tribu aux violences et à la non gestion de l’Etat lors des 17 années de règne de kabila. Le lendemain, en route pour Butembo, le fief de Mbusa Nyamwisi, autre soutien de poids de Fayulu. Les images sont impressionnantes. C’est une marée humaine qui a fait le déplacement pour l’entendre. « Ici, à cause de la violence, il y a des routes où personne ne passe. Aujourd’hui, des centaines de personnes les ont empruntées de nuit. Ils voulaient voir et entendre Fayulu. Ils n’avaient plus peur », lance un candidat local UNC qui s’est rapproché de Lamuka.

Les petites escarmouches administrativo-tatillonnes ne suffisent pas à arrêter Fayulu. Les Congolais sont vent debout. « Fayulu, c’est le candidat idéal avec les « parrains » idéaux. Si le candidat avait été Tshisekedi, il aurait été rejeté par ceux qui ne veulent ni de son nom, ni de son ethnie. La candidature de Kamerhe ne serait pas passée à l’ouest. Fayulu raffle la mise dans tout l’ouest en déshérance depuis la chute de Mobutu et la mise l’écart de Bemba », explique un journaliste congolais. Et il dispose aussi des soutiens qui lui permettent d’envisager sereinement les élections dans toute l’ancienne province du Katanga et dans le nord-Kivu. Le couple Tshisekedi – Kamerhe peut espérer faire le plein de voix aux kasaïs et au sud-Kivu. Pas assez pour embêter Fayulu mais suffisamment pour oter tout espoir de victoire au candidat de la majorité qui, malgré les moyens de l’Etat et la distribution de gadgets et d’argent ne parvient pas à attirer les foules derrière sa candidature.

Passage à la phase violente

Fayulu, malgré les tracasseries, fédèrent de plus en plus de monde. La Kabilie se raidit. Elle a compris que le « petit » a vite grandi. Elle l’empêche de faire son meeting à Kindu. Des coups de feu sont tirés. Les premières victimes de cette campagne tombent sous les balles des forces de l’ordre. Les scènes de violence se répètent à Lubumbashi et Kalemie. Mais malgré la répression aussi aveugle que mortelle, les Congolais ne baissent pas l’échine. Même cette répression violente ne suffit pas.
Réseaux sociaux et coupure annoncée d’internet

La Kabilie découvre qu’il est désormais très difficile de commettre des atrocités « en cachette ». Les réseaux sociaux jouent un rôle prépondérant. Toute forme de répression est immédiatement « distribuée » aux quatre coins de la planète. Plusieurs sources indiquent, depuis ce jeudi soir qu’Internet sera coupé à partir du samedi 15 décembre. Raison évoquée : des travaux urgents !!!

Acte III, Fayulu, de retour de Kalemie ne peut se poser à Kolwezi où il est attendu. Les autorités de l’aviation civile, soudainement passées entre les mains de Kalev, le patron des renseignements, lui interdisent le sol katangais. L’appareil est contraint de mettre le cap sur Goma. Depuis mercredi soir, le candidat de Lamuka est cloué au sol dans cette ville. Les autorités l’empêchent de décoller et de poursuivre sa campagne.

Incendie

Dans la nuit de mercredi à jeudi, à Kinshasa, dans un des quartiers les plus sécurisés de la capitale, un incendie dévaste un entrepôt de la Ceni. Le feu n’est pas encore totalement circonscrit que le bilan est annoncé. Près de 8000 machines à voter ont été détruites. Le pouvoir pointe un doigt accusateur vers le candidat Fayulu qui a toujours rejeté l’utilisation de ces machines. Un conseil de sécurité se réunit à Kinshasa sous la conduite du ministre de l’Intérieur Henri Mova, ancien ambassadeur de la RDC en Belgique.

Où sont les machines?

L’incendie à Kinshasa aurait donc détruit 8000 machines. Le processus électoral ne serait pourtant pas en danger. La Ceni ayant acheté suffsamment de machines pour faire face à ce genre de souci. Pourtant, le doute est permis et de plus en plus de voix se font entendre qui toutes affirment que la Ceni du président Corneille Naanga serait incapable d’organiser ces élections. De nombreuses voix évoquent leurs doutes quant aux machines détruites dans l’incendie. « Sans être pompier, je pense que quand 8000 grosses imprimantes, avec leurs composants chimiques et platique, sont détruites par le feu, cela doit dégager une épaisse fumée et, surtout, cela doit représenter une montagne de détritus. Que les autorités nous autorisent à aller voir l’entrepôt. Qu’elles confient l’enquête à la Monusco ou à des enquêteurs indépendants »,
propose un expatrié.

Beaucoup imaginent déjà un report du scrutin après l’un ou l’autre prochain incendie de ce type mis sur le compte de Lamuka et de son champion Martin Fayulu. Un report qu serait la seule solution pour la Ceni et ses patrons qui ne disposeraient peut-être pas d’autant de mchines qu’évoqué. « Personne n’a jamais vu la totalité des machines. Personne ne connaît d’ailleurs la cartographie des bureaux de vote » , poursuit un opposant kinois de la première heure au régime de Kabila. « Où sont-ils exactement ? Combien sont-ils ? Ces chiffres ne peuvent pas être des secrets. Il faut que tout le monde sache où se trouve son bureau de vote. Monsieur Nangaa joue les donneurs de leçons, alors qu’il nous livre la liste exhaustive de ces breaux que nous puissions aller voir s’ils exitent bien » .

Arrêter Fayulu

Le scénario est tissé de fil blanc. Le pouvoir veut faire porter la responsabilité de cet incendie à Fayulu toujours bloqué à Goma. Un mandat d’arrêt est prêt. Le pouvoir hésite. La tension est gigantesque dans le pays. Dans ce contexte, une étincelle pourrait tout embraser. Si arrestation il doit y avoir, elle n’aura lieu qu’après une courte campagne de dénigrement du candidat, après que l’armée se soit installée aux endroits stratégiques des grandes villes et, certainement, après la coupure d’internet.
Sanctions européennes

Dans ses basses besognes, le pouvoir peut toujours compter sur le soutien de certains voisins un eu douchés par la persaonnalité de Fayulu. Des voisins de l’Est qui s’accomodent très bien du pouvoir en place à Kinshasa tant qu’il lui laissent la voie libre pour leur business transfrontalier aussi juteux qu’illégal. Kinshasa peut aussi compter sur le soutien de l’une ou l’autre capitale européenne notamment celle qui est sur le point de perdre ses partenaires commerciaux traditionnels en Europe et qui se retourne vers ses anciennes colonies.
Kinshasa veut prendre sa revanche sur des institutions européennes qui ont confirmé ce lundi 10 décembre (jour anniversaire de la déclaration des droits de l’Homme) le train des sanctions contre quatorze « responsables » congolais pour leurs atteintes aux droits de l’homme, notamment le chouchou de Kabila, Emmanuel Ramazani Shadary, ex-ministre de l’Intérieur en poste lors des massacres de civils au Kasaï.

Réunion de la SADC

Face à cette dangereuse fuite en avant, les Etats de la SADC (associaton des pays de l’Afrique australe) ont annoncé une réunion ce week-end à Windhoek, la capitale de la Namibie qui préside actuellement la SADC, pour fare le point sur la situation en RDC en marge de la campagne électorale.

La RDC est de nouveau sur un volcan, comme en janvier 2015, quand Kabila a cherché à modifier la constitution pour s’inscruster au pouvoir ou, comme en décembe 2016, date de la fin constitutionnelle de son second et dernier mandat. A chaque fois, ces vagues de violences mortelles ont été dictées par la volonté du président Kabila de demeurer sur le trône du Congo. Le 23 déecmbre 2018 est la nouvelle date fixée pour son départ, après deux années de rabiot, le risque que les mêmes causes engendrent les mêmes conséquences est réel. La communauté internationale acceptera-t-elle de nouvelles tueries pour permettre à un homme et sa cour de demeurer au pouvoir sur le dos de plus de 80 millions d’âmes ?

Avec Afrique La Libre

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